William Shakespeare 1564 1616
Nous ne vous proposons pas ici une biographie du barde de Stratford ni une analyse de son œuvre. Vous trouverez en bas de cette page des liens qui nous ont évité ce travail. Nous voulons simplement aborder certaines questions qui ont fait ou qui font encore polémique.
Shakespeare n’aurait pas existé ou ne serait pas l’auteur de ses pièces.
Pas un érudit sérieux aujourd’hui ne met en cause la réalité de l’existence de William Shakespeare, elle est prouvée par de nombreux documents historiques même si l’orthographe de son nom est très variable (l’orthographe était libérale à cette époque!). La question de l’auteur est plus complexe. Shakespeare a été membre de plusieurs compagnies théâtrales où il fut en même temps auteur et comédien. On sait qu’il écrivait en fonction des membres de la troupe et que le texte devait varier suivant les comédiens et suivant le public. Il a aussi probablement collaboré avec d’autres auteurs de son époque plus ou moins célèbres. Certaines de ses pièces sont d’ailleurs reconnues comme des coproductions*.
Ce n’est que sur le tard qu’on publia certaines de ses pièces sous forme de feuillets destinés au public populaire, les in-quartos. La première publication officielle de son œuvre n’eut lieu que sept ans après sa mort. On peut donc penser que les textes qui nous sont parvenus ont été recomposés d’après les souvenirs des éditeurs, des comédiens et à partir des in-quartos. Cet aspect des choses nous donne toute liberté, en respectant l’esprit de l’œuvre, pour remanier les textes de Shakespeare en fonction de nos choix de mise en scène. Nous rêvons d’être proches des origines !
*Comme Périclès, Prince de Tyr écrit avec G. Wilkins.
Shakespeare aurait été un mauvais époux et un père indigne.
Cette vision qui voudrait que Shakespeare ait abandonné femme et enfants a été fort répandue et remise à l’honneur dans l’excellent film Shakespeare in love. On sait que Shakespeare se maria à 18 ans avec Anne Hathaway, une femme âgée de huit ans de plus que lui, chose rare à l’époque. Ce mariage fut probablement précipité par l’arrivée de leur première fille. Les époux possédèrent différentes maisons et propriétés à Stratford sur Avon et Anne Shakespeare y resta toute sa vie avec leurs trois enfants, Susana, les jumeaux Judith et Hamnet, ce dernier décédant à l’âge de 11 ans. On pourrait passer des heures à étudier l’influence des rapports familiaux dans l’œuvre du barde de Stratford : la femme plus âgée, la mort du fils, la gémellité… ce qui apporterait, s’il en était besoin, une preuve supplémentaire de la réalité de son existence d’auteur.
On a imaginé bien des raisons au départ de Shakespeare de sa ville natale mais il semble tout simplement que ce soit animé par la passion du théâtre, par l’envie de monter sur scène et d’écrire qu’il se décida à partir à Londres, probablement, tel Molière, en suivant une des nombreuses troupes de l’époque. Il revenait régulièrement à Stratford et vint y finir sa vie. Il fut toujours soucieux de sa situation financière et devint un propriétaire terrien conséquent dans sa région natale.
Religion et sexualité.
Le problème religieux est latent dans l’Angleterre du temps de Shakespeare.
L’anglicanisme est religion d’état depuis 1533 et il reste encore de nombreux catholiques qui refusent cette forme de christianisme et qui doivent donc pratiquer leur culte dans la clandestinité. On pense que la mère de Shakespeare était très proche de ces milieux crypto-catholiques et que son père, bourgeois relativement aisé, ait eu lui même quelques problèmes pour cette raison. Shakespeare se tint toute sa vie à l’écart de ces questions. Certains ont voulu aussi l’inscrire dans la franc-maçonnerie mais rien ne l’atteste et cela serait contradictoire avec son retrait des polémiques religieuses.
Le contenu de son œuvre a soulevé la question de son identité sexuelle. Son éventuelle bisexualité a scandalisé une partie de la critique internationale quand Shakespeare a été reconnu comme écrivain classique. La question de savoir si un auteur de cette époque était homosexuel dans le sens moderne est anachronique, les concepts d’homosexualité et de bisexualité n’ont émergé qu’au XIXe siècle. Bien que vingt-six des sonnets de Shakespeare soient des poésies d’amour adressées à une femme mariée, la «dark lady», cent vingt-six sont adressés à un jeune homme le «fair lord». La tonalité amoureuse de ces derniers sonnets qui se concentrent sur la beauté du jeune homme, a été interprétée comme preuve de la bisexualité de Shakespeare alors que d’autres considèrent que ces sonnets ne se rapportent qu’à une amitié intense, un amour platonique.
Quoiqu’il en soit, on trouve dans les pièces de Shakespeare de nombreuses allusions à différents types de rapports amoureux que le public comprenait immédiatement, soit sur le mode humoristique, soit sur le mode dramatique. Rappelons qu’au théâtre, à cette époque, en Angleterre, les rôles féminins étaient toujours joués par des garçons travestis. Il est possible que Shakespeare ait éprouvé un plaisir trouble à mettre en scène le personnage d’une fille, joué par un garçon efféminé mais il a parfois, dans certaines pièces, compliqué la situation en travestissant un personnage féminin en homme.
Shakespeare en Trégor?
Rien dans la biographie ne nous permettant d’affirmer qu’il séjourna dans notre région, nous ne lancerons pas d’hypothèse fumeuse sur cette question! Ce que nous pouvons par contre évoquer, c’est l’enracinement de Shakespeare dans la culture celte.
Toute sa vie durant, Shakespeare fut habité par un sens évident du surnaturel et du merveilleux, une prédilection pour l’horreur et le sensationnel sous toutes ses formes. Il invite des spectres dans Hamlet et dans certains drames historiques et des sorcières dans Macbeth. Les trames des contes de fées de son enfance transparaissent dans son théâtre d’adulte. Périclès, prince de Tyr était l’un des récits que l’on racontait dans son enfance devant la cheminée. De même, ballades et contes populaires imprègnent la trame de La mégère apprivoisée…
La forêt d’Arden, proche de la ville natale de Shakespeare fut un haut lieu de résistance des tribus bretonnes face à l’envahisseur romain. Même si du temps de l’enfance de Shakespeare elle avait déjà été bien réduite par agriculteurs et forestiers, on disait encore qu’elle était peuplée de fantômes et de farfadets. Arden vient d’un mot celte signifiant vallon boisé (c’est ce même mot qui a baptisé nos Ardennes franco-belges). La mère de Shakespeare s’appelait Mary Arden. On imagine sans peine qu’enfant, dans les histoires qu’elle lui racontait, Shakespeare apprit tout sur les sorcières qui déclenchent l’orage et sur les fées qui se cachent dans les fleurs. Il connaissait l’histoire du crapaud qui a dans la tête une pierre précieuse qui guérit, et celle de l’homme sur la lune qui porte un ballot d’épines. Il entendit parler de Puck “qui fait peur aux jeunes filles, qui vole la crème du lait, qui empêche la bière de mousser, qui cache le balai de la ménagère…” : description qui n’est pas sans faire penser à nos korrigans bretons. Les personnages d’Obéron, roi des elfes, et de Titania, reine des fées, personnages mythiques qui évoquent aujourd’hui le songe d’une nuit d’été étaient connus du public de son époque.
Quelques bouquins…
Shakespeare, la biographie, Peter Acroyd, Ed Points
Un travail extrêmement fouillé qui se lit comme un roman, incontournable pour tout savoir sur Shakespeare.
Shakespeare in love, film de John Madden
Un merveilleux film de fiction, permettant bien d’imaginer ce que devait être le théâtre élisabéthain et tant pis pour les inexactitudes dans la chronologie des pièces et dans certains éléments de la vie de Shakespeare!
Sors de ce corps William!, David Safier, Ed Pocket
Un roman déjanté, avec allers et retours entre notre époque et celle de Shakespeare.
Le testament de William S.Yves Sente & André Juliard, Ed Blake et Mortimer
Une BD avec les plus britanniques des héros franco-belges. Une théorie amusante qui répond à certaines questions que se sont posées les biographes de Shakespeare. Bien qu’on y relève deux erreurs manifestes, le nom de naissance de William (William Shake!) et la transformation d’Anne Hattaway, son épouse, en une mégère peu apprivoisée, la BD imagine une énigme cohérente construite sur l’œuvre et la vie du barde de Stratford, énigme que résoudront le professeur Mortimer et son ami Blake.